Épisode 1

Comment faire d’une vidéo pédagogique un support efficace ?

Une websérie qui analyse les processus à l’œuvre dans la scénarisation, la médiatisation et l’intégration de ressources pédagogiques à des fins d’apprentissage, avec le numérique.

La vidéo est-elle vraiment le support le plus pertinent pour atteindre un objectif pédagogique ? Facilite-t-elle toujours la compréhension et la mémorisation ? À quelles conditions devient-elle efficace ?

Mis à jour le vendredi 14 octobre 2022

Ce premier épisode de la série décryptage s’adresse à tous les enseignants et les formateurs qui réalisent des vidéos à des fins pédagogiques et qui, comme nous ici, se posent des questions pour faire mieux.

Bonjour et bienvenue dans la série décryptage, consacrée à la scénarisation pédagogique avec le numérique. Cette Websérie s’appuie sur des travaux de recherche dont les références apparaîtront au fil de la présentation. Vous retrouverez l’ensemble de ces références en fin de vidéo.  Dans cet épisode, je vous propose d’interroger l’efficacité des vidéos réalisées à des fins d’apprentissage. 

1. Une efficacité conditionnée

La vidéo est-elle vraiment le support le plus pertinent pour que les apprenants atteignent l’objectif d’apprentissage que vous leur avez fixé, notamment quand ils la consultent à distance ? 
 
Texte ou vidéo ? Quel est le plus efficace ?  
Lorsqu’on les interroge, ils sont nombreux à penser qu’une vidéo est plus claire. Peut-être le pensez-vous aussi ? 
Or, il s’agit souvent d’une illusion de compréhension. 
En effet, à durée d’exposition égale, par exemple dix minutes, et quand la vidéo est visionnée en flux continu plusieurs recherches montrent que c’est la lecture qui est la plus efficace pour comprendre et mémoriser des informations à court terme. 
 
Pourquoi ?  
Plusieurs raisons pourraient expliquer ce résultat. 
Quand un apprenant lit, son regard peut rester plusieurs secondes sur un mot ou revenir en arrière quand il rencontre une difficulté de compréhension. 
Avec le flux continu de la vidéo l’information est présentée de manière transitoire puis disparaît. Le retour en arrière ne se fait pas naturellement. 
Par ailleurs, consulter une vidéo à distance fait appel à des compétences d’autonomie que tous les apprenants ne possèdent pas. 
Certains élèves ne regardent pas la vidéo. D’autres la regardent passivement en laissant défiler les images, même quand ils ne comprennent pas : ce sont les méthodes de travail et de questionnement qui leur font défaut. 
Pour les apprenants décrocheurs ou en difficultés, il y aurait donc même un risque de dégradation des apprentissages ! 
 
Comment faire en sorte qu’une vidéo soit efficace ?
Pour qu’une vidéo soit efficace, il est d’abord nécessaire de s’assurer qu’elle est le support le plus pertinent pour atteindre l’objectif d’apprentissage. 

2. Des fonctions pédagogiques variées

La vidéo peut remplir un grand nombre de fonctions pédagogiques regroupées ici pour simplifier autour de 6 verbes : 
Informer, montrer, modéliser, convaincre, raconter et baliser.
Voici quelques exemples pour mieux comprendre. 
Au travers de la vidéo, l’enseignant ou le formateur peut chercher : 

  • à informer : 
    en apportant des éléments présentant le contexte (espace, temps, qualités…) 
    en présentant des données 
    ou en s’appuyant sur un témoignage 
     
  • à montrer le réel 
    en détaillant ou décomposant un geste ou un phénomène dynamique, 
    en rendant concrète une notion abstraite par une analogie ou un symbole 
     
  • à modéliser : 
    en présentant un phénomène ou un système sous une forme simplifiée, 
    en proposant une animation en trois dimensions 
    en construisant un stéréotype par systématisation ou catégorisation, 
    en expliquant une procédure cognitive à automatiser 
     
  • à convaincre : 
    en apportant des preuves pour convaincre 
    en réfutant une opinion 
    Ou en encore en jouant sur les émotions
     
  • à raconter 
    pour faire comprendre quelque chose au travers du récit 
    en incitant les apprenants à se mettre à la place des personnages, à éprouver des émotions et en stimulant leur imagination. 
     
  • Et enfin à baliser 
    C’est-à-dire à introduire un cours pour en préciser les objectifs, les enjeux, le déroulé, ou pour donner une consigne, pour aider, guider et accompagner les apprenants. 

3. De l’importance de la scénarisation pédagogique

L’utilisation de la vidéo est parfois très pertinente et se révèle plus efficace pour certains apprentissages, en particulier les connaissances procédurales ou motrices, à certaines conditions que nous évoquerons dans les autres épisodes. 
En revanche tout discours oral dont le contenu n’est pas illustré sera moins pertinent qu’un texte.

Ensuite, il est également nécessaire que l’enseignant ou le formateur :

  • scénarise la vidéo et la médiatise de manière pertinente, 
  • veille à conserver une durée courte, idéalement entre 5 et 7 minutes, sans dépasser une dizaine de minutes, 
  • mette en place des activités complémentaires qui nécessitent que la vidéo soit consultée, 
  • accompagne les apprenants sur les méthodes de travail. 

En quoi cet accompagnement peut-il consister ?  
Pour vérifier que la vidéo a bien été consultée et relancer ceux qui ne l’ont pas visionnée, l’enseignant ou le formateur pourra utiliser un environnement de travail adapté, (ENT), ou une plateforme d’apprentissage. 
Par ailleurs, la scénarisation de la vidéo pourra également formuler des conseils méthodologiques explicites. 
 
Avez-vous des exemples de conseils méthodologiques ?  
La liste suivante n’est pas exhaustive, mais par exemple, il est possible :
 

  • de rappeler l’importance de mettre à profit tous les temps d’apprentissage, en présentiel ou à distance, 
  • d’aider l’apprenant à vérifier que les pré-requis sont maîtrisés et à les remobiliser en amont au besoin, 
  • d’aider l’apprenant à prendre conscience de ses difficultés en lui signalant les endroits où une pause serait nécessaire, 
  • d’inciter à revoir un passage plusieurs fois, à prendre des notes, 
  • de permettre à l’apprenant d’auto-évaluer sa compréhension, 
  • de proposer enfin la réalisation d’un travail de reformulation et de synthèse, 
  • etc. 
     
    Ces conseils relèvent de la compétence 2 du socle commun, les méthodes et les outils pour apprendre. Sur le plan de la recherche ils rentrent dans le champ de la métacognition. 
     
    Dans cet épisode de décryptage, nous avons passé en revue un certain nombre de critères au service de l’efficacité pédagogique d’une vidéo. 
    Les épisodes suivants apporteront des conseils plus précis sur l’ergonomie cognitive, l’accessibilité, la scénarisation, le tournage et le montage au service de cette efficacité pédagogique. 

Bibliographie

« Les premières études menées dans le domaine de la psycho-pédagogie ont rapidement démontré que les élèves (tous âges confondus) percevaient l’apprentissage à partir de vidéos comme plus motivant, et demandant moins d’effort mental qu’un apprentissage textuel classique (Salomon, 1984). Pour autant, son efficacité en termes de performance d’apprentissage – comparé à un apprentissage textuel classique – apparaît plus contestable. »
Source : Colin Lesacret, Interagir avec des vidéos, un bénéfice pour la mémorisation

  • Merkt M., Weigand S., Heier A. & Schwan S. (2011), “Learning with videos vs learning with print : The role of interactive features”, Learning and Instruction, 21(6), p. 687-704.
  • Lieury A., Badoul D., Belzic A.L. - les sept portes de la mémoire : traitement verbal et imagé de connaissances nouvelles (cours oral, lecture, télévision). Revue de Psychologie de l’Education, 1996, 1, 9-24.
  • Poellhuber B., Des balados vidéo pédagogiques de qualité, chapitre 5.
  • Tricot A., Amadieu F., Apprendre avec le numérique, mythes et réalités : chapitre 9 Les vidéos et informations dynamiques favorisent l’apprentissage

Crédits

  • Directeur de production :
    Fabrice Gély, délégué académique au numérique
  • Réalisation :
    Anne-Cécile Franc, coordonnatrice du dossier e-formation
  • Scénarisation :
    Audrey Campbell, chargée de mission e-formation
    Anne-Cécile Franc, chargée de mission e-formation
    Aurélie Heuveline, chargée de mission e-éducation
  • Remerciements :
    André Tricot, enseignant chercheur, Université Paul Valéry Montpellier 3

Compléments :
Voir les autres épisodes de la série Décryptage

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Article rédigé par Anne-Cecile Franc